Monsieur 18h00 - page 26
Il avait beau chercher tous les arguments pour essayer de renforcer sa conviction, il se trouvait pauvret dans son argumentaire et ne pouvait s’empêcher de repenser à la soirée passée au dernier étage de l’immeuble où il travaillait et des merveilleuses sensations qu’il y avait ressenti.
Le grand chef lui manquait. Mais il se bornait à croire que ce n’était que les séances de 18h00 qui lui manquaient et que les sensations si fortes qu’il avait tant appréciées, n’étaient liées qu’à un manque trop longtemps inassouvi.
Il ne pouvait en être autrement.
C’est ainsi armé de ces convictions quelques peu branlantes, qu’il se rendit au bureau le lendemain matin.
Max et Raphael, se faisaient face dans leur bureau. Le silence habituel avait repris ses droits.
Mais Raphael, n’était pas aussi concentré qu’il l’aurait voulu. Une question, des questions, lui brulaient les lèvres, mais il n’osait pas les poser à Max.
Raphael levait régulièrement la tête, espérant attraper au vol un regard de Max qui aurait pu être prétexte à ouvrir les débats, mais Max restait concentré sur son travail et ne levait pas le bout du nez. On eut pu croire qu’il se concentrait pour ne surtout pas croiser le regard de Raphael.
Le silence pesant avait repris ses droits et rien ne semblait pouvoir le fendre.
Raphael dépérissait à vue d’œil. Pour lui se concentrer était de plus en plus difficile.
Les jours passaient ainsi et une seule pensée le hantait, une seule inquiétude, grandissante un peu plus chaque. Qu’était-il arrivé au grand chef ?
Lui qui était arrivé au début de son stage, frais et pimpant, paraissait avoir vieillit de plusieurs années. Il mangeait peu et ses joues s’étaient creusées.
Il y eut bien un jour où il crut que Max allait enfin pouvoir lui dévoiler ce qu’il savait, mais Max ne prit la parole que pour lui indiquer que son travail n’était pas à la hauteur de ce qu’il avait l’habitude de recevoir et lui demandait de revoir sa copie.
Chaque jour, les pensées de Raphael se tournaient un peu plus vers le grand chef. Chaque jour, son cœur s’emballait lorsqu’une ombre apparaissait au recoin d’un couloir.
Ne pouvant plus supporter de ne pas savoir, il finit par céder à la pression et se risqua à demander à Max s’il savait quelque chose.
La réponse de Max se fit attendre, un peu comme s’il prenait plaisir à torturer Raphael.
Puis le couperet finit par tomber.
« Désolé ! Il m’a demandé de ne rien dire ! »
Cette réponse enfonça Raphael dans un désespoir abyssal. C’était pire que de ne pas savoir.
Il avait envie de crier. De hurler que c’était injuste.
Sa tristesse était telle qu’un jour, il lâcha à Max :
« J’ai le droit de savoir ! »
Max redressa la tête. Les deux hommes se regardaient dans les yeux.
« Tu as le droit de savoir ! Et à quel titre ? »